La Semaine de la Critique est souvent une section du Festival de Cannes à même de nous faire découvrir de nouveaux réalisateurs talentueux et des personnages sur la brèche. Un jour si blanc de Hlynur Palmason le prouve avec son commissaire de police dévalant à toute vitesse la pente de la folie.
Après la mort de sa femme, Ingimundur a du mal à vivre correctement son deuil. Le temps parait monocorde et le cycle journalier efface le jour et la nuit de manière brutale ; la mise en scène est là pour nous le rappeler avec cette multitude de plans fixes qui dévisagent le quotidien de la famille aux différentes heures de la journée de manière panoramique lors des premières minutes du film. Alors qu’il se rapproche de sa fille et de sa petite fille, ce commissaire commence à chercher des indices sur la mort de sa femme et essaye de déceler les zones d’ombre de sa vie antérieure.
Mais l’enquête en elle même est un simple subterfuge pour le cinéaste, juste une possibilité scénaristique d’accompagner le personnage vers la perte de contrôle : les indices et la recherche d’information ne sont que la petite surface de l’iceberg. Très vite, le réalisateur avec son style visuel méticuleux, tranché et qui sied particulièrement à la froideur environnementale et islandaise, se détache des obligations schématiques de l’enquête : ce qui le passionne c’est scruter les errements émotionnels de son personnage, observer comment il va tomber dans l’esclandre et la mutinerie psychologique. Un commissaire abrupt, en proie au doute et qui dérive vers un mélange de culpabilité et de colère. Pour ce faire, le cinéaste s’entoure de Ingvar Eggert Sigurðsson, impressionnant de fêlures intériorisées et de charisme chevrotant.
Le point d’ancrage de l’oeuvre se situe donc à cet endroit là : à observer Ingimundur en train de jouer au foot en ne touchant pas le ballon car trop concentré à épier les hommes qui l’entourent, à le voir vivre petit à petit une vraie belle relation avec sa petite fille ou à le surveiller en train de faire des travaux pour aider sa fille. Des petits détails qui vont créer un espace cloisonné, en friche et qui peut d’un jour à l’autre tomber en ruine.
Pourtant, ce qui diminue néanmoins la portée psychologique de Un jour si blanc, est son incapacité à rendre ses scènes indissociables mélangeant tour de force visuel, sensoriel et remplissage dans le récit : un ensemble qui parait parfois discontinu et dont le regard est plus porté vers la puissance marginale de ses séquences plutôt que d’essayer de les ramifier de manière concordante. Cependant, comme dans Take Shelter qui arrivait à faire vivre l’individuel par le biais du collectif et inversement, dans Un jour si blanc, tout parait palpable et composite, comme si ce sentiment de folie et de paranoïa devenait contagieux et mortifère.
La fin, avec sa montée crescendo – découverte, dispute, violence, révélation, violence – voit le deuil et son acceptation devenir une chasse à l’homme convaincante et haletante. Ce portrait d’homme se décale gentiment vers la vengeance et l’horrifique avec notamment cette confrontation finale dans la voiture, tétanisante par son point de vue pluriel (l’enfant par exemple).
A White, White Day de Hlynur Palmason : Bande-annonce
Synopsis : Dans une petite ville perdue d’Islande, un commissaire de police en congé soupçonne un homme du coin d’avoir eu une aventure avec sa femme décédée dans un tragique accident deux ans plus tôt. Sa recherche de la vérité tourne à l’obsession. Celle-ci s’intensifie et le mène inévitablement à se mettre en danger, lui et ses proches. Une histoire de deuil, de vengeance et d’amour inconditionnel.
Le film Un jour si blanc (Hvítur, Hvítur Dagur) de Hlynur Palmason, est présenté à la Semaine Internationale de la Critique au Festival de Cannes 2019
Avec Ingvar Eggert Sigurðsson, Hilmir Snær Guðnason, Elma Stefania Agustsdottir…
Date de sortie : Prochainement (1h 49min)
Genre : Drame
Nationalités Islandais, Danois, Suédois