Le Règne animal mélange avec finesse la tension, l’humour et l’angoisse, le tout enveloppé de thématiques actuelles.
Synopsis : Dans un monde en proie à une vague de mutations qui transforment peu à peu certains humains en animaux, François fait tout pour sauver sa femme, touchée par ce phénomène mystérieux. Alors que la région se peuple de créatures d’un nouveau genre, il embarque Émile, leur fils de 16 ans, dans une quête qui bouleversera à jamais leur existence.
Le règne de la crudité
Bien que l’histoire prend des aspects fantastiques, les effets spéciaux sont d’un réalisme étonnant et les blessures paraissent plus vraies que nature. La violence n’est pas esthétisée : elle est montrée dans son bain de sang et dans toute sa rudesse. Ainsi, les blessures d’Émile ne sont pas dissimulées, et ses douleurs sont filmées comme un documentaire. La bestialité humaine en ressort : il n’y a pas de non-dits et de sensibilité cachée.
Par contre, globalement, le jeu des acteurs nous éloigne de cet aspect documentaire… Si ce n’est Romain Duris, qui allie parfaitement l’humanité et la bestialité dans son jeu, comme il y parvient dans la plupart de ses films.
La nature face aux comportements humains
Le film traite de la cohabitation impossible entre êtres humains et « bestioles », si l’on reprend les termes utilisés dans l’intrigue. En effet, chaque espèce veut nuire à l’autre alors que chacun aimerait intrinsèquement vivre en paix avec l’autre espèce. La peur de l’inconnu effraie les deux côtés, ce qui amène à des violences. D’ailleurs, la contamination bestiale du film ne peut nous empêcher de penser à la Covid. Nina mentionne même le couvre-feu… Mais ce qui importe, c’est la place de la peur face à l’inconnu : dans le long-métrage, la maladie est apparue deux ans auparavant. Cette courte durée entraîne des doutes et des incompréhensions face aux effets et aux conséquences de la maladie, tout comme la Covid.
Cependant, nous constatons que les personnes contaminées finissent par vivre avec le « virus ». Elles s’adaptent et s’éloignent de la société humaine, qui est devenue un danger pour elles. Elles s’adaptent également à la nature, ce qui les éloigne davantage des êtres humains. Finalement, au-delà de tout aspect environnemental, les personnages arrivent mieux à s’entendre lorsqu’ils deviennent des bêtes… Ils n’ont pas besoin de parler pour se comprendre. Alors que les humains vivent dans la peur constante de se faire contaminer, cette peur est de facto absente chez les créatures. Ils font davantage confiance à l’environnement qui les entoure.
Un père et son fils
Le film traite également du deuil et de la gestion relationnelle entre un père et son fils. Nous apprenons dès le début du récit que la mère est atteinte du syndrome bestial. Émile considère même qu’elle est morte, car il ne la reconnaît plus. François essaie de rester jovial, plein d’humour et d’amour. Il est cependant seul pour s’occuper de son fils, et a du mal à trouver un équilibre entre la proximité et la sévérité vis-à-vis de lui. Comment peut-il être à la fois l’ami et le père d’Émile ? Comment peut-il combler le manque maternel ?
Quant au jeune Émile, malgré l’affection qu’il porte à son père, il tente de se défier de lui, de défier son autorité et de le contredire. Il se cache de lui, sûrement anxieux de le blesser. De nombreux plans rapprochent le père et son fils dans le même cadre, comme pour montrer que leur lien est indestructible malgré les obstacles. De plus, la caméra épaule accentue la vulnérabilité des personnages, en plus d’apporter des mouvements volontairement sauvages aux plans.
Bande-annonce – Le Règne Animal
Fiche technique – Le Règne Animal
Réalisateur : Thomas Cailley
Scénario : Thomas Cailley, Pauline Munier
Avec Romain Duris, Paul Kircher, Adèle Exarchopoulos…
Musique : Andrea Laszlo De Simone
Décors : Julia Lemaire
Costumes : Ariane Daurat
Photographie : David Cailley
Montage : Lilian Corbeille
Effets spéciaux de maquillage : Frédéric Lainé, Jean-Christophe Spadaccini
Effets visuels : Cyrille Bonjean
Production : Pierre Guyard
Société de production : Nord-Ouest Films, StudioCanal, France 2 Cinéma, Artémis Productions
Budget : 15,96 millions d’euros3
4 octobre 2023 en salle / 2h 08min / Science fiction, Aventure, Drame
Film présenté en ouverture de la sélection Un Certain Regard au Festival de Cannes 2023.