Instinct de Survie s’annonçait comme un survival aquatique qui dépote. Manque de pot, la seule victime à déplorer sera le réalisateur Jaume Collet-Serra, qui surnage dans ce plagiat à peine digeste de Gravity et des Dents de la Mer.
Synopsis : Partie surfer sur une plage déserte, Nancy se retrouve coincée sur un rocher à quelques mètres du rivage. Un grand requin blanc rôde dans les parages.
On serait probablement en train de mentir si l’on vous disait que l’on n’attendait pas Instinct de Survie. Un squale qui veut se faire la plantureuse Blake Lively pour son quatre-heure et une nature devenue en un rien de temps un enfer : c’est bien simple, Instinct de Survie s’annonçait comme la déclinaison aquatique du Gravity d’Alfonso Cuaron. Et vu la claque éprouvée par le trip philosophico-spatial du réalisateur mexicain, autant dire que la perspective de se frotter, quelques mois après Desierto, à un nouveau survival minimalo-naturaliste n’était pas pour nous déplaire. D’autant plus que derrière la caméra on retrouve Jaume Collet-Serra, un réalisateur espagnol, qui à défaut de figurer parmi les grands de la profession, a su prouver par plusieurs fois son talent à emballer des thrillers de bonne facture, qui plus est venant de scénarios faiblards (Night Run) ou clairement risibles (Non-Stop). Mais force est d’admettre que si ses deux précédentes moutures avaient su trouver leur public, rien n’indiquait cette fois-ci que cette virée dans les eaux turquoises du Queensland soit créditée d’un même succès. D’autant qu’en convoquant un tel sujet, mâtiné de pléthore de références cinématographiques, le bougre s’aventurait sur une pente (très) glissante.
Shark is coming !
Et ça n’a pas manqué. A ceux espérant un petit miracle de la part du réalisateur espagnol, passez donc votre chemin. Si tant est qu’aujourd’hui il soit difficile de faire des suites, il demeure assurément plus compliqué encore de faire de l’ombre ou tout au plus d’exister dès lors que les références que drague le projet dans ses filets proviennent de grands noms de la pellicule. D’abord Seul au Monde, puis Gravity, tout en finissant par Les Dents de la Mer -la référence obligée dès lors qu’un squale débarque devant un objectif-, le film n’a ainsi besoin que de quelques minutes pour dévoiler son criant manque d’inventivité. Entre une héroïne pour le moins nunuche, prétextant une virée dans l’inconnu pour faire le point sur sa vie (le scénario énonce discrètement que la belle fait des études de médecine), un squale pour le moins antipathique qui n’aura de cesse de tourner en rond attendant sa proie comme le ferait un petit gros sur son Twix, et une représentation de la nature hyper stylisée teintée de ralentis incessants et d’une musique électronique insupportable, autant dire que le style erratique de l’espagnol agace prodigieusement. Manque de pot, ce ballet aquatique se paie le luxe de compter sur un scénario tout bonnement crétin enchaînant les incohérences mais surtout les situations les plus délirantes, comme celle de voir la belle Lively, salement amochée, lancer la conversation avec un goéland, faute de pouvoir communiquer avec la terre ferme. Juste retour des choses diront certains, tant ledit passage semble renvoyer directement au cas voyant Tom Hanks converser avec son ballon dans Seul au Monde. La différence est faible certes, mais suffisante pour montrer que là où Wilson symbolisait une nouvelle preuve de l’isolement de son interlocuteur, le volatile représente pour la belle un espoir. Et malgré sa situation pas bien engagée, cet espoir s’avérera payant car le personnage campé par la blonde incendiaire arrivera à trouver les forces nécessaires pour mettre la misère à un requin qu’on n’imaginait pas aussi mécanique dans son comportement et sa gestuelle, puisque doté d’une faculté de déplacement et vitesse calculées par Lively (!!!)
Never met a girl like you before
Fatalement, avec un script aussi risible et un style clipesque assez gênant, le metteur en scène ne peut se tourner que vers son actrice principale pour assurer le spectacle. Si l’on louera sans problème la plastique avantageuse de Lively, on ne pourra qu’être attristé en fin de compte, de voir la jeune femme se muer en vulgaire argument commercial, tant le sieur ibérique semble décidément plus concentré à l’idée de faire des ralentis sur ses cuisses ou ses seins, que de distiller ne serait-ce une once de tension dans ce joyeux foutoir aquatique. Opéra dédié à sa beauté et son physique (on passera sur le développement de son personnage qui ne se résume qu’à une femme en quête d’un diplôme de médecine, et accessoirement à la survie), le film se contente alors d’aligner les scènes en pilotage automatique, distillant ça et là, quelques pics de tensions, sans cesse désamorcés par un effet de style soit clinquant soit navrant et ruinant peu à peu la moindre touche d’espoir qu’on pourrait éprouver à la vue de cet hybride mal dégrossi des Dents de la Mer et 127h.
La maestria de ses modèles en moins, Jaume Collet-Serra a quand même tenté de faire son Gravity dans les eaux du Queensland. Si un vilain squale a remplacé le vide de l’espace, reste que le film donne à voir les limites du genre et celles du cinéaste espagnol avec.
Instinct de Survie : Bande-annonce (VOSTFR)
Instinct de Survie : Fiche Technique
Titre original : The Shallows
Réalisation : Jaume Collet-Serra
Scénario : Anthony Jaswinski
Interprétation : Blake Lively (Nancy) ; Óscar Jaenada (Carlos) ; Sedona Legge (Chloe)
Direction artistique : Nathan Blanco Fouraux
Décors : Hugh Bateup
Photographie : Flavio Martínez Labiano
Musique : Marco Beltrami
Production : Lynn Harris et Matti Leshem
Sociétés de production : Ombra Films et Weimaraner Republic Pictures ; Sony Pictures Entertainment (coproduction)
Sociétés de distribution : Columbia Pictures (États-Unis), Sony Pictures Releasing France (France)
Langue originale : anglais
Format : couleur – 2.35:1
Genre(s) : Drame, horreur, thriller
Durée : 87 minutes
Dates de sortie : 17 août 2016
Etats-Unis – 2016