Critique Hasta Mañana
Synopsis : Orphelin depuis son jeune âge, Léo grandit au foyer des Cigales. Fragile, il s’est réfugié dans l’écriture et rêve d’être lu par son idole de toujours, le réalisateur Claude Lelouch. Il passe ses journées avec Nino, jeune adolescent de 12 ans qui réside lui aussi au foyer. Ils sont inséparables, comme deux frères. Mais un jour Nino disparaît avec la nouvelle que Léo vient de terminer. Il n’a laissé qu’un mot expliquant les raisons de sa fugue : trouver Claude Lelouch et lui apporter l’histoire… Au fil de son périple, Nino envoie des lettres à Léo, lui contant l’évolution de son aventure. Mais Léo commence à se douter que les raisons de la fugue de son ami, sont d’une autre nature…
Le cinéma n’est pas une question d’argent
Olivier Vidal et Sebastien Maggiani sont deux réalisateurs résidant à Montpellier, le dernier venant tout juste d’obtenir son bac. Cependant, il débute le cinéma à 13 ans pour son premier court métrage sur la maladie de Cutis laxa, une maladie de vieillissement de la peau précoce. Faisant déjà preuve d’une maturité incroyable, il continue sur sa lancée et commence à coréaliser des films avec Olivier Vidal, un réalisateur tout aussi talentueux qui a commencé en 2002 avec Au loin…l’horizon, avec le regretté Mouss Diouf. En 2012, commence le projet Hasta Manana, produit par SoFilms Indépendants, en partie sous forme de kickstarting (financement libre), et s’offrant de surprenants guests.
Dans ce premier long métrage, les réalisateurs nous proposent une histoire dans un foyer pour enfants. L’un d’entre eux Léo, un véritable cinéphile, écrit chaque jour une nouvelle. Il possède notamment des posters de nombreux films de Claude Lelouch, son idole, comme Les uns et les autres et Le voyou mais aussi des posters de 2001 de Kubrick, Léon de Besson ou encore Pierrot le fou de Jean-Luc Godard. Son ami, Nino, avec lequel il est inséparable, s’éprend de liberté et décide d’apporter sa nouvelle à Claude Lelouch.
Ce premier film agit comme une véritable révélation, que ce soit pour les auteurs comme pour les acteurs. La mise en scène est d’une grande maturité et permet une immersion totale dans ce groupe d’adolescents aussi fragiles que courageux. Même si cette réalisation souffre de certains aspects répétitifs avec un style caméra à l’épaule mal exploité, on ne boudera pas notre plaisir. Ainsi, nous ne pouvons que féliciter ces jeunes réalisateurs talentueux, qui vont évidemment émerger et à qui nous souhaitons le meilleur.
La distribution est d’ailleurs très prometteuse pour les jeunes adolescents, surtout les matures et professionnels Amir Ben Abdelmoumen et Antoine Gautron, jouant respectivement Nino et Léo, les deux amis inséparables. Nous avons aussi des révélations, comme Delphine Depardieu (la nièce de Gérard) et Alysson Paradis, la sœur de Vanessa Paradis, ainsi que des guests apparaissant lors de caméos bien conçus, tels que Jean Pierre Castaldi en aveugle (très drôle), et Claude Lelouch.
Nous avons également ici un scénario très émouvant où nous nous identifions de manière immédiate. L’histoire des personnages est sincère et touchante, tout autant que le film en général. L’émotion se construit de manière très fluide, dans un récit bien construit. Nous pouvons enfin croire à nouveau au cinéma français, car ce film apporte la fraîcheur dont nous avons tous besoin. Cet aspect à la fois primeur et candide apporte la justesse qu’il faut quand cela semble nécessaire. Grâce à cela, le film touche énormément.
J’ai eu la chance de pouvoir connaître les deux réalisateurs, d’espérer prochainement m’inscrire à la SoFilms Team et de voir le film à leur côté. Ces derniers m’ont raconté les secrets du tournage, la formation du budget et la genèse du projet. De plus, nous avons réussi à convaincre certains passants d’aller voir le film et cela à payer. Les réalisateurs étaient très heureux et moi de même ! Une des mes meilleures expériences cinéma…
Les deux réalisateurs ont réussi à superbement retranscrire des thèmes poussés et travaillés. Nous pouvons reconnaître ainsi le thème de l’amitié, cher aux réalisateurs, l’amitié qui fait grandir, (nous le voyons de belles manière grâce à l’inséparabilité des deux amis quasi fraternels et interdépendants) mais aussi la liberté, d’expression, de mouvement, appréhendées comme essentiel. Et bien évidemment, nous avons l’enfance, surtout l’enfance difficile. Sublimés par l’interprétation des acteurs, cette expérience cinématographique est forte. Le spectateur a droit à une très belle réflexion sur l’enfance, qui peut être la sienne ; nous devons être libres et forts. De ce message parfaitement retranscrit à l’écran, découle toute la beauté du film.
Au final, Hasta Mañana révèle la toute nouvelle fraîcheur du cinéma français avec des acteurs talentueux, en devenir, et des réalisateurs tout aussi talentueux et émergents. Tout ce talent est mis à disposition pour un film sincère et touchant, au thème intelligent et à la réalisation certes parfois bancale, mais largement perfectible. Donc bravo à ce beau travail pour leur tout premier film, que nous vous recommandons vivement.