Sarah Anthony © Texte et illustrations tous droits réservés.

Mode iconique : le Rose Shocking ou Rose Schiaparelli

Aujourd’hui, découvrons ensemble une couleur qui a marqué la mode, en même temps que l’univers des petites filles : le Rose Shocking ! Vous connaissez sans doute le rose Schiaparelli – autre nom de cette nuance – sans savoir qu’il se nomme ainsi. C’est typiquement le rose Barbie, très intense et voyant. Cette nuance de fuchsia doit ce nom à la créatrice de mode qui l’a rendue célèbre.

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Le Rose Schiaparelli, d’après Elsa Schiaparelli

Née à Rome en 1890, Elsa Schiaparelli est une couturière italienne d’origine napolitaine et piémontaise qui sera, au cours de sa vie, naturalisée française. Elsa naît dans un milieu social très élevé : ses parents sont aristocrates et la mettent au monde dans un palais, le Palazzo Corsini, situé dans le quartier du Transtévère, en face de la Villa Farnesina.
Dans les années 1930, la styliste romaine s’installe à Paris. C’est en effet au cœur de la capitale de la mode qu’elle choisit d’ouvrir sa maison de couture, tout simplement car c’est dans cette ville qu’elle a découvert le monde chatoyant du stylisme, et ce alors qu’elle était en vacances. Pourtant, à l’époque, le Rose Shocking n’est pas encore d’actualité… C’est seulement en 1936 que l’artiste découvre ce rose vif qui deviendra sa marque de fabrique. Il lui est présenté par Jean Clément, le mari d’une de ses vendeuses, qui occupe la fonction de parurier, alors qu’elle cherche à créer des pièces roses et innovantes. Dès qu’elle le voit, la couturière tombe amoureuse : ce rose sera son rose.

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Une couleur so shocking…

Parce qu’à l’époque déjà, un tel rose choque, le choix d’Elsa est vite fait : avec beaucoup d’humour, elle va appeler cette nuance le Shocking Pink ou Rose Shocking (rose choquant). Très rapidement, ce coloris prend ses quartiers dans ses collections jugées audacieuses, originales et avant-gardistes. La couturière italienne, dont la devise de la maison est « Pour le sport, pour la ville, pour le soir » est influencée par les surréalistes. Elle fréquente notamment les artistes Salvador Dalí et Tristan Tzara, sans oublier l’écrivain et peintre Jean Cocteau. D’ailleurs, cette influence, comme celle du cubisme, se dévoile dans les collections d’Elsa Schiaparelli, parsemées de trompe-l’œil et d’éléments symboliques. On peut citer en exemple le soleil qui, deux ans après la découverte du Rose Shocking, ornera la cape Phoebus (collection hiver 1938-39), vêtement bien évidemment rose !
Aucune surprise donc à ce que dès 1936, cette femme fantasque tombe amoureuse de cette nuance de rose fuschia devant lequel il est dur de rester impassible. Elsa assume à fond le côté too much de cette couleur, qu’elle dit volontiers criarde. Comme beaucoup d’autres nuances très vives, le Rose Shocking tient une place importante dans les vêtements que crée désormais la styliste, au point de se faire connaître aussi sous son patronyme.
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… qui finit par définir à la fois la femme et la marque.

Aujourd’hui, si le Rose Shocking est si connu, c’est parce qu’il fut popularisé par les pièces audacieuses de la maison Schiaparelli. Plus que de Rose Schiaparelli, on parle de Shocking Pink, et l’adjectif anglais a peu à peu évolué pour définir aussi l’artiste. L’autobiographie de la couturière, publiée en 1954 et sobrement intitulée Shocking Life, en témoigne !
Elsa y décrit la vie haute en couleurs qu’elle a menée, en passant volontiers de la première personne du singulier à la troisième, et en ne lésinant pas sur les événements choquants et amusants qui ont jalonné cette « vie en rose ». Finalement, la découverte fortuite d’une nuance de rose particulièrement vive a su façonner une existence aussi tape-à-l’oeil et mémorable pour la créatrice d’une maison toujours sur le devant de la scène mode à l’heure actuelle.

Si aujourd’hui, cette couleur fait toujours autant parler d’elle, c’est grâce à Elsa Schiaparelli. A présent, vous ne direz plus « rose Barbie »… Vous pourrez glisser l’air de rien « Rose Schiaparelli » ou « Rose Shocking ».

Texte partiellement extrait de l’Abécédaire Artistique n°19. Texte et illustrations Sarah Anthony © Tous droits réservés.