Quand une famille recomposée fait d’un robot géant sa nouvelle demeure, les surprises ne sont pas rares… C’est l’argument principal de H.O.M.E, nouvelle série initiée aux éditions Dupuis.
Tout commence comme si l’on observait la famille occidentale archétypale : un adolescent aux oreilles recouvertes par un casque, sa petite sœur absorbée par une vidéo, une famille recomposée en route vers sa nouvelle demeure, dans un quartier résidentiel où les maisons, en tous points similaires, sont minutieusement alignées comme des endives. Pour rompre cette monotonie et provoquer les premiers sourires, rien de tel qu’un chef de famille inquiet par une fissure imperceptible sur une façade et un robot intergalactique venant aussitôt réduire en cendres la résidence espérée irréprochable. C’est ainsi que débute le premier tome de H.O.M.E et c’est dans ce contexte que notre famille va désormais loger à l’intérieur d’un robot.
L’intérieur, justement, parlons-en. Avec stupéfaction, les Kadic découvrent des pièces volumineuses, des couloirs sans fin, des hauteurs insoupçonnées. Cela ne fait pas un pli : de l’extérieur le robot a beau présenter des dimensions semblables aux maisons environnantes, à l’intérieur tout apparaît immense, comme si l’espace avait été décuplé. Mais ce n’est pas tout : la cave abrite des missiles thermonucléaires, les tables font s’évaporer les objets que l’on pose dessus, le dressing est rempli de combinaisons spatiales, les toilettes constituent un sas entre différents univers. Et puisque le récit s’attache avant tout à des humains ordinaires placés dans des situations extraordinaires, cette initiation à un monde jusque-là inconnu provoque chez nos personnages… l’envie de prendre des selfies pour Amstramgram (sic).
Ce premier épisode intitulé « Restez chez vous » comprend plusieurs histoires, aux planches très (trop ?) découpées. Une fois la familiarisation effectuée avec le robot, la bande dessinée perd de son souffle. Les deuxième, troisième et quatrième récits reposent tous sur la difficulté de cacher aux autres que l’on vit à l’intérieur d’une engin intergalactique. Il y a d’abord la grand-mère, atteinte de la maladie d’Alzheimer, qui aimerait visiter la nouvelle maison de sa fille. Il y a ensuite ces voisins insistants qui sonnent à votre porte pour vous souhaiter la bienvenue dans le quartier. Il y a enfin les visites de classe impromptues. Avec à chaque fois, un propos sous-jacent : la relation mère-fille et la culpabilité ressentie à l’idée de placer nos aînés dans des hospices, les conventions sociales auxquelles on se plie sans forcément y goûter, les démonstrations de richesse et les comparaisons entre adolescents.
Rudy Spiessert et Hervé Bourhis continuent d’ailleurs sur cette même voie en confrontant la famille Kadic à des policiers sourcilleux tout en initiant une autre intrigue filiale, à trois sujets cette fois, entre Arthur, son beau-père et son père biologique, un astronaute présumé mort en mission. Forcément, à force de placer ses protagonistes face aux mêmes enjeux (la peur de voir leur secret éventé mêlée aux menaces extraterrestres), l’album a tendance à s’enliser, et c’est d’autant plus perceptible qu’à de rares occasions près, énoncées plus haut, la psychologie des personnages n’est jamais vraiment creusée. Il faudra alors se contenter, faute de mieux, des gags disséminés çà et là et d’un esprit bon enfant plutôt plaisant.
Aperçu : H.O.M.E (Dupuis)
H.O.M.E – Tome 1 : Restez chez vous, Rudy Spiessert et Hervé Bourhis
Dupuis, mai 2021, 60 pages