Sublime et envoutant, In Mood For Love de Wong Kar-Wai, est un chef-d’œuvre d’une perfection esthétique absolue.
In The Moood For Love est l’œuvre d’une vie, l’œuvre d’un auteur qui depuis toujours, a fait de son cinéma une exigence. Plus beau film du maître, il est l’aboutissement de toute une carrière qui vit s’enchaîner les chefs-d’œuvre pour aboutir à l’ultime sommet d’un talent artistique, œuvre unique dans le cinéma d’aujourd’hui. Pourtant, In The Mood For Love effraie, le cinéma de Hong-Kong impressionne par son exotisme et son univers qu’on imagine inaccessible. Cinéma du ressenti plus que du raconté, film de l’impression plus que de la narration, Wong Kar Wai captive par ce qu’il suggère, plus que par ce qu’il montre, mais reste accessible à tous les esprits.
L’histoire tient en quelques mots, écrits à l’encre de Chine sur le papyrus du scénario. M. Chow et Mrs Chan emménagent avec leurs conjoints dans la même pension. La promiscuité des lieux et les circonstances vont pousser leurs conjoints respectifs l’un vers l’autre, laissant M. Chow et Mrs Chan seuls face à face, hésitants sur l’attitude à adopter, d’autant que la vie semble vouloir les pousser eux aussi l’un vers l’autre. Le film de Wong Kar Wai tournera autour de cette idée des amours trahies, comme une variation sur le même thème, qui verrait peu à peu la naissance d’un amour refusant d’éclore pleinement.
Wong Kar Wai impressionniste
Tout le talent du metteur en scène est là. Enchanteur de l’image, Wong Kar Wai est réputé pour son talent pictural. D’une histoire d’amour, il tire une galerie de peinture, parvenant à transmettre par sa mise en scène, par ses cadrages purement plastiques, les plus fortes émotions que peuvent ressentir deux êtres épris. Chaque plan, chaque accessoire, chaque ligne de fuite est voulue, à sa place et pleine de sens. Le hasard est prohibé; le travail de l’image est unique et sublime la beauté des décors, des personnages et de leurs sentiments.
Wong Kar Wai aime ses personnages presque physiquement. Il suffit pour cela de voir à quel point M. Chow et Mrs Chan sont d’une troublante beauté sous l’œil de sa caméra, suscitant un mélange unique de désir et de fascination. Maggie Cheung est sublimée comme jamais elle ne l’a été et jamais plus ne le sera. Mélange de fatale beauté et d’intense fragilité, elle devient la femme ultime : reine de beauté et femme universelle. Elle déambule d’une image à l’autre, d’une beauté grandissante qui gagne en force sous les ralentis de Wong Kar Wai.
C’est d’ailleurs une des autres forces de ce chef-d’œuvre : ses deux acteurs principaux, habitués des films du réalisateur et ici complémentaires comme jamais ils ne l’ont été auparavant. Ils rivalisent de délicatesse, retenant tout excès de jeu et pratiquant la suggestion par les gestes et les expressions, comme Wong Kar Wai le fait avec sa caméra. Tony Leung promène son flegme quasi britannique de long en large, alternant les sourires las et les regards tristes, donnant plus à voir par un simple regard que par des lignes de dialogues.
Ces dialogues jouent de la partition musicale, autant que les notes du compositeur Shigeru Umebayashi, auteur ici d’une des plus belles et sensibles partitions jamais entendues au cinéma. Les dialogues, le travail sur le son, la composition musicale et la mise en scène entrent en symbiose, créant l’œuvre cinématographique parfaite, débarrassée des oripeaux scénaristiques pour ne se consacrer qu’à la beauté formelle, rendant palpable sur pellicule la notion de beau. Car ce film est d’une beauté pure, de cette beauté capable d’émouvoir aux larmes comme seule la joie peut le faire. Les visages sont lascifs et les scènes d’une tendre intimité, qui embaume une douceur suave.
Wong Kar Wai, qui jusqu’ici faisait de chaque film une expérience, semble trouver sa voix artistique pour atteindre la maturité et le génie qui font désormais de lui un membre de la cour des grands. In The Mood For Love, sans être intellectualisant, amène quiconque le regarde à découvrir la beauté d’une caméra, experte à révéler ce que l’amour renferme d’intensité. Il ne faut pas craindre ce film, ses origines et son sujet. Il est une œuvre unique, qui jamais plus ne se laissera oublier, au risque d’être ému aux larmes, rien qu’en s’en repassant les images au film des pensées…
Synopsis: Hong Kong, 1962, Madame Chan originaire de Shanghai vient de trouver une chambre à louer dans l’appartement de Madame Suen, une compatriote de Shangaï. Le jour de leur déménagement, Monsieur Chow et sa femme emménagent aussi sur le même pallier chez la voisine de Madame Suen. Madame Chan travaille comme secrétaire dans ce qui semble être une agence de voyage. Monsieur Chow lui est rédacteur d’un journal local. Il a comme ami un collègue qui joue, parie son argent et fréquente les putains. Monsieur Chan voyage beaucoup à l’étranger et notamment au Japon d’où il ramène à sa femme et ses amis des objets à la mode , comme un sac à main ou un autocuiseur. Madame Chan et Monsieur Chow finissent par se parler et s’apercevoir que leurs conjoints sont amants…
Fiche Technique: In the Mood For Love
Titre Original : 花樣年華
Réalisateur: Wong Kar-wai
Scénariste: Wong Kar-Wai
Acteurs: Goo Gam-Wa, Kelly Lai Chen, Maggie Cheung Man-Yuk, Mama Hung, Rebecca Pan Di-Hua, Roy Cheung Yiu-Yeung, Siu Ping-Lam, Tony Leung Chiu-Wai
Pays: Chine
Genre: Mélodrame, Drame, Romance
Compositeur: Michael Galasso
Directeur De La Photographie: Christopher Doyle, Mark Lee Ping-Bin
Monteur: William Chang Suk-Ping, Wong Ming-Lam
Date De Sortie: 8 novembre 2000
Auteur : Le Cinéphile Dijonnais