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Sarah Anthony © Textes et illustrations tous droits réservés.

Peinture expressive, pause musicale, toile imprimée, avancées cinématographiques et poème archaïque – l’abécédaire artistique n°26

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ABC… ART

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L’Abécédaire Artistique fête 1 an d’existence avec son 26ème numéro et vous remercie pour vos lectures ! 

Cet abécédaire vous parlera de :

Art en général, peinture, arts graphiques, sculpture, gravure, littérature, poésie, musique, cinéma, Histoire, gastronomie, traditions, arts vivants, théâtre, opéra, philosophie, etc.

Rendez-vous un jeudi sur deux pour une chronique d’art illustrée où vous découvrirez 5 définitions artistiques issues de lettres de l’alphabet choisies aléatoirement.

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  • Expressionnisme

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catégorie : arts plastiques, avant-garde du XXème siècle, peinture, littérature, architecture, nom masculin.

L’expressionnisme est un courant artistique à multiples ramifications. On peut citer par exemple l’expressionnisme abstrait, ou encore l’expressionnisme allemand. Le fauvisme, sur le fond comme sur la forme, peut aussi être rattaché à l’expressionnisme. Bien que pictural à ses débuts, l’expressionnisme se développe aussi dans d’autres domaines artistiques tels que le cinéma, l’architecture, la littérature, etc. 

Il apparaît au début du XXᵉ siècle à la suite de divers phénomènes, culturels ou sociétaux. Sur le plan de l’art, l’expressionnisme se développe paradoxalement dans une forme de continuité et d’opposition à l’impressionnisme. Avant même la fin du XIXᵉ siècle, le peintre néerlandais Van Gogh se dissocie de l’impressionnisme. Alors que ce dernier mouvement s’attache à représenter les impressions colorées créées par les différentes lumières, Vincent Van Gogh, quant à lui, cherche à exprimer les drames et les pensées humains, et ce, au moyen d’une peinture colorée, matérielle et laissant apparaître la touche. On qualifie ses œuvres de néo-impressionnistes, signe que le courant perd de sa force. L’évolution se poursuit vers l’expressionnisme, un courant qui ne s’intéresse plus à la contemplation ou à la poésie du paysage, mais au contraire un mouvement actif et vivant centré sur les pensées de l’artiste. La peinture colorée de Paul Gauguin fait aussi partie de cette mutation vers l’expressionnisme en France. 

Mais l’expressionnisme n’apparaît pas que pour se détacher de l’impressionnisme, il naît aussi pour  se distinguer de la photographie, dont la portée grandissante menace la peinture, notamment son statut de moyen de reproduire le réel. Avec les premiers photographes dès la fin du XIXᵉ siècle, il devient urgent pour la peinture de se réinventer. Puisque la photographie produit déjà des images fidèles de la réalité, pourquoi la peinture n’en proposerait-elle pas une autre lecture ? Une lecture plus intense, plus colorée, plus expressive. 

Ainsi, partout en Europe, l’expressionnisme se répand dans les ateliers d’artistes. Dans les pays nordiques, ce courant pictural entre en résonance avec les grands auteurs que sont notamment Ibsen ou Strindberg (également peintre), attachés à retranscrire leurs états d’âme. Edvard Munch en est par ailleurs un des précurseurs : il peint les décors de Peer Gyntpièce de théâtre d’Ibsen, mise en musique par Grieg (voir entrée Peer Gynt, l’Abécédaire artistique n°27).
C’est aussi avec son œuvre Le Cri (réalisée en cinq exemplaires dont aux pastels et à la peinture), que le peintre influence toute la Scandinavie, mais aussi l’Allemagne, pays essentiel à l’expressionnisme et particulièrement à l’un de ses sous-mouvements dit « allemand ». 

Dans ce pays, l’expressionnisme allemand se résume essentiellement à deux groupes : Die Brücke (le Pont) et Der Blaue Reiter (le Cavalier Bleu) – qui feront l’objet d’entrées à venir.
Les artistes du premier collectif cherchent à exprimer leur souffrance. Pour eux, la fonction de l’art est de faire le lien entre l’homme et le monde hostile. La peinture doit être libre, les lignes peuvent être violentes et brisées, les couleurs trop intenses. La représentation n’a pas besoin d’être parfaite, car c’est l’expression de l’idée qui compte.
À l’inverse, les artistes du Cavalier Bleu représentent, à leur manière expressionniste, la nature de manière idéalisée. Ainsi, les couleurs, bien que vives, sont harmonieuses, tout comme les lignes, géométriques ou non, donnent à voir des images embellies, adoucies et plutôt plaisantes à l’œil.
En Allemagne, un autre courant dérive de l’expressionnisme. Entre Berlin et Zurich, le mouvement Dada (voir l’Abécédaire artistique n°9) produit des œuvres expressionnistes en opposition à la morosité de la société en guerre. En Belgique, le peintre James Ensor donne à l’expressionnisme le visage grimaçant de squelettes se glissant dans la bonne société.

Enfin, l’expressionnisme abstrait (début du XXᵉ en Europe, puis milieu du même siècle aux Etats-Unis), qu’on doit par exemple aux peintres Paul Klee ou Wols, cherche à transcrire sur la toile les passions, les réflexions, mais aussi les tourments que ressent l’artiste, sans plus se soucier de les incarner de manière figurative. Il en résulte des œuvres dans lesquelles couleurs, lignes et coups de pinceaux sont marqués par une énergie, voire une agressivité permettant de lire le geste du peintre, et par extension, sa pensée. De l’autre côté de l’Atlantique, l’expressionnisme abstrait se développe à New York après la Seconde Guerre mondiale avec l’Action painting et le dripping (voir l’Abécédaire artistique n°24). 

 

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  • Intermezzo

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catégorie : musique, opéra, théâtre, nom masculin de l’italien (intermède). 

Intermezzo signifie en italien « intermède », mède ayant le sens de « demi ». L’intermezzo, comme l’intermède, est donc ce qui s’intercale à la moitié. Il ne s’agit pourtant en aucun cas d’un entracte ou d’une pause… à moins que l’on se réfère à une pause musicale. 

L’intermezzo est, en effet, un type de composition musicale courte destinée à s’intercaler entre les actes d’une œuvre musicale plus longue. Au XVIᵉ et XVIIᵉ siècles, les intermezzi sont fréquents et permettent de faire une pause dans l’intrigue ou dans l’intensité dramatique, et ce grâce à leur légèreté – voilà pour l’aspect scénique. Leur grande utilité est surtout d’éviter l’ennui du public pendant les changements de décors entre les actes. À l’époque, ces changements peuvent durer longtemps et s’avérer complexes. Captivé par l’intermezzo, le public ne se disperse pas – voilà pour l’aspect pratique. À l’époque, il ne s’agit pas que d’une musique, mais d’un spectacle miniature, avec ses comédiens, ses danseurs, ses costumes. Sa portée comique pose les premiers jalons de l’opéra buffa (voir l’Abécédaire artistique n°17). Dans les palais italiens, les plus belles fêtes peuvent aussi se targuer d’intermezzi en guise de légère pause musicale parmi les concerts.

Deux siècles plus tard, l’intermezzo évolue vers plus de sobriété. S’il conserve sa fonction d’intermède entre les actes d’une œuvre dramatique, il n’est plus que musical, pendant mélodieux de l’entracte.

 

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  • Toile de Jouy

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catégorie : arts textiles, arts décoratifs, nom féminin, issu de la ville de Jouy-en-Josas

La toile de Jouy est un type de textile apparu à la fin du XVIIIᵉ siècle. Ce tissu a pour particularité des motifs monochromatiques imprimés sur un fond uni et représentant souvent des personnages (humains et animaux) dans un décor de type pastoral. 

La toile de Jouy tire son nom de la commune de Jouy-en-Josas (Yvelines), où elle fut conçue dans la manufacture Oberkampf. Bientôt, le nom et la technique se répandent, comme ce type d’étoffe : la mode de la toile de Jouy est née. Et sans surprise, pour ce tissu dont la délicatesse des motifs n’est pas à contester. Car il ne s’agit en aucun cas d’un travail de broderie, ni même de peinture sur tissu ou de pochoir, mais bien d’un travail d’impression. Des tampons de bois gravés sont enduits de colorant et appliqués sur la toile vierge. Les tissus sont ensuite étendus dans les prairies avoisinant les manufactures, avant d’être traités pour que les couleurs se fixent. Plus tard, la production sera mécanisée grâce à des plaques de cuivre au lieu de planches, permettant ainsi, entre autres, d’ajouter des nuances. 

Vous serez sans doute étonnés de lire que la toile de Jouy est une étoffe de type indienne ! Un peu surprenant au vu de ses motifs européens. En fait, une Indienne est un type de tissu peint ou imprimé dont le procédé a été copié sur des textiles importés d’Orient (Inde et Perse). De nombreuses manufactures en France ont repris la technique, l’adaptant aux goûts européens. La toile de Jouy en est un pur exemple. 

La plupart du temps, la toile de Jouy est une étoffe de coton beige sur laquelle apparaissent des figures en une seule couleur (bleu clair ou rouge). Il peut arriver que les tons du fond et des motifs soient inversés avec par exemple des personnages beiges sur un fond bleu. 

Avec son charme bucolique et ses motifs représentés le plus souvent dans un style gravure – pour des raisons monochromatiques – mais surtout rococo, la toile de Jouy est typiquement un textile d’antan, qu’on va aujourd’hui retrouver dans les décorations traditionnelles. Et ce grâce à son élégance désuète, bien que son âge d’or soit depuis longtemps passé. On le doit, certes, aux teinturiers à l’origine de sa création, mais aussi aux artistes qui en créèrent les motifs, à l’instar du peintre Jean-Baptiste Huet, membre de l’Académie royale de peinture et de sculpture.

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  • Travelling et panoramique

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catégorie : cinéma, noms masculins respectivement de l’anglais (déplacement) et du français. 

Dans la famille des mouvements de caméras, le travelling et le panoramique sont complémentaires. En effet, ces deux types de déplacements d’appareils sont distincts, avec chacun sa spécialité, ses objectifs et ses résultats propres. 

Commençons par le plus connu, le travelling. Pour le réaliser, un cinéaste fait déplacer sa caméra grâce à des rails. Celle-ci a donc un pied mobile, pourtant son axe est fixe. On peut effectuer des travellings avant et arrière, ou gauche et droite.
À l’inverse, dans le cadre d’un panoramique, le pied de la caméra ne bouge pas, puisqu’elle repose sur un trépied. En revanche, celle-ci peut pivoter de droite à gauche ou de haut en bas. Il existe les panoramiques latéraux ou verticaux.

Cela vous semble peut-être similaire, ce n’est pourtant pas le cas. Un travelling donnera un mouvement de caméra droit et fixe : une caméra qui avance ou recule sans dévier, ou une caméra qui se promène à droite et à gauche en restant sur la même ligne imaginaire au niveau du sol. Le fameux travelling compensé, quant à lui, consiste à faire un travelling arrière tout en zoomant, ou à l’inverse, à dézoomer tout en faisant avancer la caméra. Le résultat ? Une impression que le décor bouge de manière surnatuelle. C’est cet effet qui est utilisé dans La Communauté de l’anneau (Peter Jackson, 2001), lorsque Frodon regarde le chemin, alors qu’il va croiser un cavalier noir pour la première fois, et fuir avec Sam, Merry et Pippin.
Dans une optique différente, un panoramique produira une image plus mobile, un balayage du décor « courbe » comme si la caméra tournait la tête de gauche à droite ou de haut en bas.
Pour réconcilier les deux, il existe le pano-travelling, avec, par exemple, une caméra qui s’avance pour ensuite pivoter sur le côté. Enfin, dans le cas de plans larges, une caméra fixée sur une grue peut se déplacer dans le décor : c’est la trajectoire.

 

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  • Villanelle

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catégorie : musique, chant et poésie populaires, nom féminin de l’italien « villanella » dérivé de « villano » (paysan, vilain). 

La villanelle emprunte son étymologie au vilain, le paysan libre au Moyen-Âge. Rien de surprenant à cela, puisqu’il s’agit d’un type de poésie chantée typiquement paysan. Originaire de l’Italie populaire et médiévale, la villanelle prend son essor au XVᵉ siècle, se trouve en vogue au XVIᵉ, avant de décliner après le XVIIᵉ siècle. 

Elle se chante à plusieurs et répond à une codification bien précise, avec glissement d’un refrain d’une strophe à l’autre et des vers s’adaptant pour conserver le sens général du poème et sa progression. Toutefois, aucune forme précise ne nous est parvenue. On peut supposer que les règles en ont évolué au fil des époques, mais aussi des lieux et tout simplement de la fantaisie de ses compositeurs. 

Parce que c’est un chant paysan, la villanelle a souvent pour thème des sujets pastoraux et bucoliques. Ceux-ci sont légers ou du moins traités avec légèreté, évoquant la nature ou l’être aimé. Dans les villages, il peut arriver qu’on danse en rythme des villanelles, alors accompagnées d’instruments de musique.

Rendez-vous dans deux semaines pour 5 nouvelles définitions artistiques. Pour vous proposer un contenu toujours aussi passionnant, l’Abécédaire Artistique est mis en ligne un jeudi sur deux.

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