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Un pays qui se tient sage : un documentaire de David Dufresne qui questionne et retourne

Presque un an après les manifestations violentes entre gilets jaunes et forces policières, Un pays qui se tient sage, le documentaire de David Dufresne, retourne en images sur les événements qui ont ébranlé toute la France pour chercher à questionner la légitimité de la violence. A travers des vidéos choquantes et des témoignages marquants de citoyens mais aussi de journalistes et historiens, il invite avant tout à la réflexion et au débat. Présenté cette année à la Quinzaine des Réalisateurs, ce documentaire rappelant parfois Les Misérables – présentée à Cannes en 2019-  dresse de nouveau un portrait peu reluisant des forces de l’ordre en France.

La France, mondialement réputé pour être le pays des droits de l’homme, de l’éducation gratuite et de la sécurité sociale a bien changé depuis la Révolution Française. En 2019, face aux injustices sociales, les français mécontents ont endossé des gilets jaunes et ont commencé à manifester dans les rues de France. La totale indifférence du chef d’État a fait monter la colère des citoyens, et les manifestations, d’abord pacifiques, se sont transformées en véritable affrontements entre manifestants et forces de l’ordre. De manière incontrôlable, les Champs-Élysées  et les autres rues de France se sont transformées en théâtre d’une guerre civile. Un pays qui se tient sage, porte un titre bien ironique, pour parler des conséquences de ce soulèvement qui a assombri l’image de la France et le destin des citoyens français.

Le monopole de la violence en 2019

Ce documentaire est avant tout un discours ouvert qui soulève des tas de questions : Jusqu’où la violence est-elle justifiable ? Qui l’exerce vraiment ? Lorsqu’elle devient illégitime, qui la juge ? Faut il répondre par la même violence ? Toutes ces réflexions sont mises en lumière au cours du reportage par différents intervenants, qui s’appuient également sur les vidéos prises pour exposer leur point de vue. Retour sur des images de violences filmées dont on a du mal à croire à la véracité, tellement celles-ci paraissent inimaginables dans un pays comme la France. Mais ce documentaire est à la fois nécessaire, pour se remettre en question en tant que pays démocratique. Historiens, philosophes et journalistes témoignent et débattent pour remettre en lumière des concepts essentiels de la légitimité ou du droit à exercer la violence.  En décalage, le documentaire s’attardent également sur des témoignages de citoyens, manifestants et victimes  -ou proches de victimes- de violences policières montrées en images. Ces passages ajoutent heureusement au discours parfois trop académique, une touche d’humanité et un lien émotionnel nécessaires à ces images choquantes.

Aux armes (et aux vidéos), citoyens !

Si le but du documentaire est de débattre sans prendre parti, il est tout de même dommage de n’avoir qu’essentiellement des témoignages ouverts de la part des victimes des forces de l’ordre, rendant le discours assez manichéen par moments. Le spectateur devient vite submergé par les images et les émotions, ne pouvant nier la culpabilité des forces de l’ordre dans l’abus de l’exercice de leur fonction. Principalement lorsque les extraits nous rendent témoins des dommages collatéraux irrémédiables – comme la perte de main ou d’œil –  des manifestants venus exprimer leurs droits civils librement et non armés pour la plupart. Pour justifier ce manque de prise de parole des forces de l’ordre, on apprend au générique que les principaux acteurs et représentants des forces de l’ordre ont été contraints de garder le silence. Preuve que la liberté tant proclamée reste plus un concept qu’une réalité pour certains français.

Un État qui maintient l’usage légitime de la violence

Alors peu importe notre opinion, les manifestations violentes filmés sont comparables à des images de guerres civiles dans les dictatures d’aujourd’hui et d’hier. Le documentaire est d’ailleurs plus à prendre comme une remise a jour de l’image faussement idyllique de la démocratie française auprès des autres pays du monde. Enfin, on pourrait reprocher au documentaire de parfois perdre son spectateur en concepts théoriques énoncés par les historiens, qui rentrent dans des débats éloignés de notre réalité.

Au final, ce documentaire reste dans l’actualité car le combat n’est pas fini. En septembre 2020, a l’heure d’une crise sanitaire mondiale, des gilets jaunes continuent à manifester dans les rues de Paris pour exprimer leur mécontentement. Mais la violence sera-t-elle de nouveau au rendez-vous ou la France est elle redevenue véritablement un pays sage ?

 

Un pays qui se tient sage – Bande-annonce

Un pays qui se tient sage – fiche technique

Titre original :  Un pays qui se tient sage
Titre international : The Monopoly of Violence
Réalisateur :  David Dufresne
Photographie :  Edmond Carrère
Montage :  Florent Mangeot
Montage Son : Théo Serror
Producteur :  Bertrand Faivre
Maisons de production :  Jour2Fete, Le Bureau
Distribution (France) : Jour2Fete
Durée :
Genre : Documentaire
Date de sortie :  30 Septembre 2020
 France – 2020

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3.5