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« Fenêtre sur cour » et « Les banlieusards » : même combat !

A travers ces deux films « Fenêtre sur cour » et « Les banlieusards », qui possèdent un certain nombre de similitudes, comment les scénaristes parviennent-ils à rendre leurs personnages principaux aux pratiques douteuses attachants ?

Fenêtre sur cour (Alfred Hitchcock, 1954) et Les banlieusards (Joe Dante, 1989) sont deux films séparés par 35 ans mais qui ont malgré tout beaucoup de points communs, que ce soit leur sujet, leur localisation ou leur rapport à l’art. Et ce n’est pas un hasard si ces deux films possèdent des corrélations puisque Dana Olsen, le scénariste du film de Joe Dante est un grand admirateur du film d’Alfred Hitchcock, avouant même qu’il s’agit de l’un de ses films préférés et nommant le projet en hommage à ce dernier : Bay Window (Rear Window étant le titre américain de Fenêtre sur cour).

Mais au-delà de ses similitudes, il est intéressant de voir comment les deux scénaristes,  d’un côté John Michael Hayes pour Fenêtre sur cour et de l’autre Dana Olsen pour Les banlieusards, réussissent à rendre un personnage principal aux pratiques douteuses attachant aux yeux du spectateur.

Premièrement, pour chacun des deux principaux protagonistes, une excuse est trouvée pour qu’ils se trouvent prisonniers de chez eux. Pour le personnage de James Stewart dans Fenêtre sur cour, il s’agit d’une blessure, une jambe cassée. Et pour le personnage de Tom Hanks dans Les banlieusards, il  s’agit d’une semaine de vacances qu’il souhaite passer à son domicile. Avec ces deux situations initiales, les deux films deviennent des huit clos : l’un à l’échelle d’un appartement, l’autre à l’échelle d’un quartier qui confrontent les personnages à l’ennui.

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James Stewart et Grace Kelly dans Fenêtre sur cour

Deuxièmement, les deux scénaristes trouvent un moyen détourné pour que les personnages se mettent à espionner leurs voisins. Dans le cas de Fenêtre sur cour, le choix de faire du personnage de James Stewart un photographe n’est pas hasardeux. En utilisant son appareil photo pour regarder ses voisins, le personnage est dans le prolongement de sa profession et de sa passion. Cela permet en quelque sorte de légitimer ce qu’il fait. Ce qui n’aurait pas été le cas s’il n’était pas photographe et qu’il regardait ses voisins avec, par exemple, une paire de jumelles. Pour Les banlieusards, il en est de même. Ce sont les habitudes peu conventionnelles et les vacarmes causés par ses voisins la nuit dans leurs caves qui amène le personnage de Tom Hanks à espionner ces derniers.

Troisièmement, ils leur trouvent une justification de continuer. Il s’agit ici, dans les deux films, de la supposition par le personnage principal que l’un de ses voisins est un meurtrier, l’amenant à ne plus être un simple voyeur mais un enquêteur qui en observant ses voisins cherche des indices qui pourraient l’aider à sauver des vies.

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Tom Hanks (au centre), Bruce Dern (à gauche) et Rick Ducommun (à droite) dans Les banlieusards

Enfin, dernièrement, ils leurs trouvent un entourage. Les deux protagonistes ne sont pas solitaires, ce sont des personnages entourés, avec des amis ou une famille. Ils leurs donnent des relations sociales tout à fait conformes aux mœurs de la société et les amènent même à partager leur découverte avec leur entourage qui va plus ou moins les croire et/ou les aider.

En incorporant tous ces éléments dans le traitement de leurs personnages, John Michael Hayes et Dana Olsen créent des protagonistes qui malgré leur activité paraissent honnêtes et bienveillants, et auxquels les spectateurs peuvent se rattacher. Ils arrivent à légitimer une pratique, celle du voyeurisme et s’en amusent avec le spectateur en lui rappelant des situations qu’il a pu connaître ou en lui rappelant que lui-même, devant un film est un voyeur, observant des personnages qui n’ont pas conscience de l’être.

Fenêtre sur cour et Les banlieusards sont deux grands films dans deux domaines bien distincts, l’un étant un oppressant thriller et l’autre une hilarante comédie satirique. Ils n’ont pas perdus de leur actualité et méritent toujours d’être découverts ou redécouverts aujourd’hui.